JOURNAL DES MINES
Journal des Mines est un travail photographique sur l'empreinte historique, sociale et environnementale de l'activité minière en Ariège. Dans un territoire menacé par l'oubli, Elie Monferier interroge la disparition progressive des traces matérielles, des archives et des témoignages par lesquels la mémoire se constitue et circule. En se confrontant à des sites miniers rendus inaccessibles par la mutation des paysages, les conditions météorologiques, l'altitude ou encore l'érosion, il sonde comment les différentes strates de la mémoire agissent sur ce que l'on peut ou ne peut pas voir, et comment ce qui demeure caché hante une approche photographique sans cesse renvoyée à la notion de perte.
Dans les Pyrénées, depuis l'antiquité romaine jusqu'à la fin des années 1980, l'Ariège a été un haut lieu d'extraction minière. De nombreux filons sillonnent le territoire : argent, plomb, zinc, phosphate, fer, tungstène. Avec la révolution industrielle, plusieurs concessions minières importantes se développent. Deux sites remarquables en particulier voient le jour : la mine de Bentaillou, à 2000 mètres d'altitude, et la mine de Bulard, la plus haute mine d'Europe, vertigineusement nichée à 2700 mètres d'altitude. L'accès à cette dernière est tellement dangereux qu'on la surnomme la mangeuse d'hommes.
De ce passé minier, il ne reste pas grand-chose. Quelques vestiges que l'on peut découvrir au détour d'un chemin, des baraquements effondrés, de rares panneaux explicatifs, des rails et des chariots brisés, de la forêt par-dessus. Les mines sont aujourd'hui condamnées par mesure de sécurité. Quand la nature n'a pas repris ses droits, au mieux trouve-t-on sur place une lourde grille, une plaque commémorative et des éboulis à côté. Au-delà d'un documentaire sur une activité humaine circonstanciée à un territoire, Journal des Mines est une réflexion critique sur ce qu'implique la création d'un paysage : comment ce qui disparaît dialogue avec le visible ?